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Limitation du nombre de partis politiques en Guinée : Elhadj Bakary Bérété, Président du Haut conseil de Oulada , adresse un mémorandum au CNRD

21/6/2022

  MEMORANDUM

Bref rappel historique
I - introduction
L’évolution politique actuelle de notre pays est l’objet de vives préoccupations du fait de l’instabilité engendrée par la répétitivité des violences à relents interethniques.
Malheureusement de nos jours, toutes les tentatives de développement de notre pays se heurtent encore à cette situation.
C’est la raison pour laquelle il nous a paru utile de revisiter notre histoire commune, de cerner les causes à l’origine de ces violences, de les circonscrire, et enfin d’envisager des mesures propres à nous en prémunir à l’avenir .
II - De la création de la Guinée
La Guinée française a été pensé, initié, et créé par le Décret du 1ér Avril 1889 après la conférence de Berlin. Ce décret l’a détachée de la tutelle du Sénégal.
Le décret du 10 Mars 1893 parachève ce détachement pour en faire une colonie indépendante telle qu’elle apparait aujourd’hui, ceci au prix de laborieuses négociations avec le Portugal du côté Nord-Ouest et l’Angleterre du côté SudEst.



III – De l’origine des mouvements et des partis politiques
La prise de conscience des populations, de leur statut de colonisées a été le fait des militaires africains ayant participé aux deux grandes guerres mondiales 1914 -1918 ; et 1939 – 1945.
Ceux – ci ont contribué de retour dans leurs pays à l’éveil des consciences pour hâter la libération des colonies du joug colonial
La France ayant pressenti ce vaste mouvement qui s’amorçait dans toutes les colonies mit à profit la conférence de Brazzaville de 1944 pour concéder à ses colonies la liberté de constituer des partis politiques à l’effet de participer aux élections.

En l’absence de partis Politiques même clandestins , l’on assiste plutôt à la création de mouvements structures en fonction des différentes composantes sociologiques du pays, leurs dénominations respectives comme suit s’expliquent d’elles-mêmes.

L’union des ressortissants de la basse Guinée
Amicale Gilbert vieillard
l’Union Mandingue
l’union des ressortissants de la guinée forestière L’objectif de chacun des mouvements s’articulait autour de l’intérêt régionaliste mais jamais autour des défis et des enjeux auxquels le territoire dans son ensemble était confronté.

Chaque mouvement a privilégié avant tout pour des raisons particulières ses intérêts absolument particuliers.

Dès lors qu’il s’agissait de députation, chaque candidat représentait sa région d’origine et même élu il avait du mal à se départir de la vision étriquée, régionaliste au profit d’une vision qui embrassait l’ensemble du territoire.

Le découpage territorial colonial a favorisé et accentué le clivage ethnique

De ce découpage s’est retrouvée une mosaïque d’ethnies ,chacune occupant une zone géographique précise dont les mœurs, et cultures différent fondamentalement. le colon s’évertuera en vain à forger dans chacune des ethnies la conscience d’appartenir à un même territoire

IV-Le jeu politique sous l’ère coloniale

C’est à partir de 1946 – 1947 que la vie politique a commencé à s’animer avec l’arrivée sur la scène Politique du PDG, de la DSG et du BAG tous calqués sur les modèles occidentaux.
Lorsque la France décida de doter les territoires de gouvernements locaux, elle organisa en 1956 le premier scrutin, le parti qui obtiendra le plus de suffrage dirigera le gouvernement
Le manque de culture démocratique aidant, chaque parti affûta ses stratégies pour la conquête du pouvoir.
Ces élections ne se passeront malheureusement pas sans violence
Les stigmates de cette période de violence tardent à se cicatriser et persistent encore dans le subconscient des Guinéens
Ce fut le point de départ de tout ce que le pays connaitra comme violences à tort ou à raison
Le PDG en sorti vainqueur, la première page de l’histoire politique de notre pays venait d’être tournée
V -Le jeu politique post indépendance
La 1ere République
Par le vote du 28 septembre la Guinée est devenue une République avec une seule pensée politique.
Ce système a survécu à toutes les tentatives de déstabilisation avec les conséquences qui en ont résulté
Apres 26 ans de règne une junte militaire prit le pouvoir suite au décès du Président Ahmed Sékou TOURE
La seconde page de l’histoire du pays venait ainsi d’être tournée.

La 2ème République
Avec ce régime un changement radical d’orientation idéologique a été amorcé tant sur le plan politique économique culturel que social.
Le Général Lansana CONTE stratège militaire connaissant parfaitement le pays aidé en cela par sa profonde observation des guinéens mus par une sournoise haine ethnique qui s’était emparée même de l’élite, préconisa l’instauration de deux partis politiques
Cette proposition n’a pas emporté l’adhésion des hommes politiques, car si cette idée prospérait leur arrivée au pouvoir était compromise d’avance
La situation qui prévaut de nos jours dans le landerneau politique Guinéen a fini par donner raison au défunt Président au regard de la prévalence de la politique d’ethno stratégie des partis.
La 3ème République
Celle-ci a été accouchée dans des conditions autrement plus dramatiques que les précédentes, la velléité de confiscation du pouvoir par la junte d’alors a conduit au massacre de 157 Guinéens au stade du Septembre en 2009 .
La tentative d’assassinat du chef de la junte qui s’en est suivie est illustrative des menaces d’instabilité qui continuent de peser sur le pays pour le contrôle du pouvoir.
Il a fallu attendre Décembre 2010 pour l’organisation d’une élection démocratique avec les résultats que l’on sait aujourd’hui de la gestion du défunt régime.
La troisième page de l’histoire de notre pays venait d’être tournée suite à l’avènement du CNRD le 5 Septembre 2021 .
L’atmosphère politique qui prévaut dans notre pays apparait comme la suite logique des précédentes crises depuis l’ère coloniale jusqu’à nos jours
Cette atmosphère est caractérisée par :
Une gouvernance chaotique des régimes successifs qui n’ont ni su ni pu assurer un transfert pacifique du pouvoir.

Le nombre élevé des partis politiques environ 180 allié à leur faible représentativité pour la plupart ont fini par faire constituer des fiefs d’essence quasi ethnique , source d’accentuation du clivage interethnique lors des consultations électorales .

Un état de pauvreté très marqué d’une frange importante de la population qui contraste avec l’immense potentiel de
développement du pays

VI Répertoire des violences du fait du déficit de culture démocratique
Il nous a paru essentiel d’évoquer les temps forts des violences qui ont émaillé l’histoire politique de notre pays avec les conséquences psychologiques qui persistent encore de nos jours
L’on peut noter :
Les violences de 1956-1958 entre le P.D.G et le B.A.G pour le contrôle du gouvernement autonome
Les tentatives multiples de déstabilisation du premier régime qui ont culminé par l’agression du 22 Novembre 197O
Les violences perpétuées lors de la tentative de putsch de juillet 1985.
Le massacre des manifestants lors des évènements menés par les syndicats et la société civile en 2006/2007.
Le massacre du 28 septembre 2009 au stade du même nom.
Des affrontements inter ethniques de 2010 résultant de l’instrumentalisation de l’affaire de l’eau empoisonnée.
Le massacre de centaines de citoyens de 2011 à nos jours lors des manifestations de l’opposition .
Aucune partie du territoire n’y a échappé, des communes rurales, celles urbaines et des districts .

Il convient de rappeler dans la panoplie des exactions commises que c’est par la violence que :
L’armée prit le pouvoir en 1984
L’armée est revenue sur l’arène politique en 2008
10 - L’élection présidentielle de 2010 a été organisée dans une atmosphère à forts relents d’affrontements inter ethniques.
Il ressort de ce qui précède que bien avant l’indépendance le pays a évolué dans une atmosphère d’adversités quasi permanentes.

De nos jours le risque de violence demeure, il est entier et doit être source de véritables préoccupations de la part des gouvernants.
Les menaces de manifestation qui se profilent à l’horizon au moment où le pays fait face à trois dynamiques déstabilisatrices.
l’atténuation de l’effet combiné de ces trois facteurs doit figurer au premier plan des priorités des nouvelles autorités
Il s’agit :

Du renchérissement de plus en plus marqué du prix des produits de première nécessité et de large consommation du fait d’une inflation à deux chiffres 12,7%.
Du contre coup du choc économique externe qui frappe de plein fouet une économie locale extravertie
.
Du risque d’exacerbation des relents inter ethniques dans la perspective des prochaines échéances électorales.
A notre sens toute erreur d’appréciation et d’analyse de l’imbrication de ces 3 facteurs peut se révéler contreproductive à court terme.
L’inversion de cette tendance ne peut intervenir que par des reformes hardies et courageuses impliquant autant les gouvernants, la classe politique que la société civile.
Aussi diverses que variées que sont les reformes à engager, elles sont surtout et d’abord d’ordre politique.
Elles seront certes difficiles à mettre en œuvre mais nécessaires, car rien ne doit condamner notre pays à demeurer dans une perpétuelle crise auto entretenue.
L’axe d’effort principal doit porter sur le diagnostic à poser pour identifier les points faibles, forts, les atouts et les menaces pour donner toutes les chances de réussite à ces réformes.
En y mettant la pédagogie qui sied, elle nous mettra à l’abri d’une future-alternance tumultueuse voire problématique .
Aussi dans la perspective d’une approche concertée pour mieux cerner le diagnostic du mal qui ronge notre pays, nous avons saisi au vol comme une aubaine le pertinent constat fait par l’imam de la grande mosquée lors de la rencontre avec le chef de l’état dans le cadre des assises nationales .

Citation :
L’exacerbation de l’ethnocentrisme est le fait de la classe politique, surtout entre ceux qui veulent se maintenir au pouvoir et ceux qui veulent y accéder.
Ce premier diagnostic nous donne la clé qui permettra d’adopter pour l’ensemble des intervenants une approche unifiée par une seconde lecture de la proposition de deux partis de Feu le General Lansana Conté.
Il reste évident que du moment que ce sont les partis politiques qui sont à l’origine de l’exacerbation des tensions interethniques, c’est à ce niveau que devrait résider la solution du problème.
La transition en cours nous offre aujourd’hui une chance unique de se départir définitivement de nouveaux risques inutiles.
Comme toute réforme elle se heurtera toujours à une résistance émanant de certains partis notamment ceux se considérant comme historiques et ou plus représentatifs assurés qu’ils sont , d’avoir le pouvoir à portée de main
Vu sous cet angle la question préjudicielle est de savoir quelle stratégie élaborée pour briser le prisme ethnique caractéristique majeur du marigot politique guinéen.
Il existe de bonnes raisons d’ordre historique d’adhérer à l’option de réduction du nombre de partis du fait que l’option en cours a produit les résultats que l’on sait.

L’option limitation de partis va induire la nécessité pour toutes les composantes sociales de se fondre sans distinction en un véritable melting pot dissolvant au passage le caractère dominant de toute ethnie pour la conduite des affaires publiques.
Dans la négative pour cette option ,quelles chances laisserons nous aux cadres politiques ayant la stature d’homme d’état que recèlent les ethnies dites minoritaires pour se retrouver au plus haut sommet de la superstructure d’état.
En tout état de cause le multipartisme tel qu’en vigueur dans le contexte actuel de notre pays et voir même en Afrique représente un implant institutionnel qui a du mal à se greffer et prospérer harmonieusement dans un corps social évoluant dans un environnement socio-historique et culturel différent de celui occidental.
Faut-il noter au passage que trois facteurs contribuent à l’échec de cet implant
La majorité de la population est analphabète, ne sachant de faite ni lire un projet de société à fortiori une constitution.
La précarité économique marquée par une forte intensité de pauvreté 55% de la population entrave le citoyen appartenant à cette catégorie de choisir un parti politique en toute Indépendance
L’absence d’une justice impartiale complique l’équation polico-sociale déjà très tendue du pays par un repli identitaire source de sécurité face à l’arbitraire .

Conclusion :
la question que l’on doit se poser aujourd’hui est de savoir si oui ou non on est en droit de limiter le nombre de partis politiques.
L’intérêt de la limitation du nombre de partis est incontestable et est particulièrement nécessaire en raison des expériences douloureuses et même des abus dus au multipartisme .
Il faut a notre pays un véritable réingéniering politique et social.
Bien que la deuxième République se soit engagée dans un processus de démocratisation avant la Baule , le multipartisme intégral avait été reconnu par un homme politique occidental comme un luxe en raison des conditions socio-historiques concrètes de notre continent .
Avec le recul du temps et les expériences vécues la portée de sa prédiction s’est avérée juste.
l’écueil majeur du multipartisme intégral réside dans le fait qu’au lieu de renforcer l’unité de la nation, il a fragilisé le tissu social à travers le repli identitaire dont certains leaders politiques en sont devenus malheureusement et pernicieusement les chantres.
Quelle que soit l’appréciation que l’on fait , le choix du multipartisme intégral avec environ 180 partis pour un nombre d’électeurs de l’ordre de cinq millions est un véritable gâchis social qui fait que notre pays continue d’être classé par les institutions spécialisées comme très fragile .
Dans le cadre de l’implémentation de la nouvelle culture démocratique, l’élite politique en a profité pour faire distiller un principe de démocratie très mal assimilé en comparaison à celle en vigueur en occident .
Cela a eu pour conséquence l’expression populaire violente souvent abusive dans la rue, pour défier les pouvoirs publics avec toujours un bilan macabre à la clé.
Ces violences récurrentes accentuent le ralentissement de l’activité économique et obèrent le pouvoir d’achat par l’insécurité économique des populations.
En termes de risques potentiels d’instabilité, les conclusions de l’international Crisis group lors des évènements de 2006 -2007 restent de nos jours pertinentes et actuelles.
Citation.
Les observateurs de la scène Guinéenne qui estiment que la vie politique est articulée au tour des rivalités inter ethniques sont stupéfaits de constater que le pays n’a pas encore éclaté au regard de ce que ce type de politique identitaire a produit dans les pays voisins de la guinée.Des réformes strictes et courageuses sont nécessaires si on souhaite éviter le scénario des pays voisins et ou de voir la scène politique guinéenne baignant dans un climat anarchique.
Aussi paradoxal que cela puisse paraitre ceux qui ont conduit leurs pays à ces scénarios ont été des opposants historiques, et qui ont une fois au pouvoir renié ceux qu’ils ont toujours prêchés.
In fine, si l’option de réduction du nombre de partis est agrééé pour conjurer le péril d’affrontement inter ethnique, il est suggéré l’approche méthodologique qui suit .
Ainsi mettant à profit la période transitoire dans la perspective des élections programmées de la base au sommet, il pourrait être envisagé qu’il soit attribué à parts égales à tous les partis politiques agréés le financement nécessaire à leurs participations aux prochaines élections communales .
A l’issue de ce processus les deux ou trois premiers partis seront les seuls admissibles et éligibles à toutes les consultations électorales.
Il sera dès lors loisible aux autres partis n’ayant pas pas répondu aux critères d’admissibilité de se fondre dans le parti de leur choix.
Cette reforme a un coût qu’il faut assumer afin de réinscrire notre pays dans le cercle vertueux des nations qui ont su tirer positivement les leçons de leur histoire.
C’est au prix de ces réformes courageuses face à cette dérive de violences interethniques que notre pays traine comme un boulet qui va constituer ce que l’histoire retiendra comme le grand chamboulement qui a permis de définir la ligne de partage entre la Guinée d’avant et celle d’après le 05 Septembre 2021 .


Le Président du Haut conseil de Oulada

Bérété Bakary

Conakry le 20 Avril 2022

 

 
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