18/11/2024
L'homme d'affaires, opérateur économique, entrepreneur, ou peut-être les trois à la fois, Kerfalla Person Camara, communément appelé KPC de Guicopres, a officiellement pris position pour la première fois en faveur d'une gouvernance de plusieurs années pour le Général Mamadi Doumbouya, à travers un mouvement de soutien de la Casse-Madina. Pour lui, Mamadi Doumbouya serait l'homme qu'il faut à la Guinée pour plusieurs années encore, et il compte pleinement s'investir pour l'atteinte de cet objectif.
Ceci est inédit, car c'est la première fois que KPC prend officiellement position pour un chef de l'État ou une personne désireuse de gouverner la Guinée après des élections présidentielles de type occidental. Et même s'il ne l'a pas encore déclaré officiellement, tout porte à croire que Mamadi Doumbouya évolue dans cette direction, au vu des différents mouvements autorisés officieusement en faveur de cette ambition.
De feu le Général Lansana Conté, sous la gouvernance de qui il a émergé pour la première fois, au professeur Alpha Condé, KPC a toujours apporté un soutien politique discret et officieux à tous les chefs d'État qui se sont succédé à la tête de la Guinée. Avec un appui plus ou moins prononcé pour le capitaine Moussa Dadis Camara et Sékouba Konaté, tandem sous lequel il a bénéficié de plusieurs marchés de construction — la plupart sans appels d'offres ou par consultations restreintes —, notamment pour des routes, des rénovations et des constructions de camps militaires, ce qui a véritablement fait sa fortune. Même si les appréciations quant à l'efficacité des travaux publics qu'il exécute divergent, les uns les trouvant catastrophiques, les autres appropriés par rapport aux montants fixés par les marchés.
Jouant sur tous les tableaux, il a soutenu financièrement aussi bien le candidat du RPG/Arc-en-ciel, le professeur Alpha Condé, que celui de l'UFDG, Elhadj Cellou Dalein Diallo, lors de l'élection présidentielle de 2010, mettant fin à la première transition en Guinée. Une polémique a d'ailleurs éclaté, selon laquelle il aurait offert une enveloppe d'argent lors du deuxième tour de l'élection présidentielle de 2010 au candidat Alpha Condé, somme qui aurait été détournée par la directrice de campagne du candidat, dame Makalé Traoré, sans qu'elle n'arrive au destinataire. Cette dernière a toujours nié les faits, pourtant confirmés par le donateur lui-même et le ministre secrétaire général de la présidence de l'époque, Tibou Kamara. Comme pour dire que KPC a toujours été dans l'ombre des affaires politiques de ce pays, évidemment pour l'assurance de ses propres affaires. Il n'est d'ailleurs pas le seul dans ce cas, la plupart des opérateurs économiques soutiennent dans l'ombre les politiciens les plus en vue dans ce pays. Ceux de Madina, eux, soutiennent en coulisses le leader de l'UFDG — qui passe pour être le plus soutenu de ces commerçants et opérateurs économiques —, tandis que cette fois-ci, KPC le fait ouvertement en faveur de celui qu'il convient d'appeler désormais potentiel candidat à la future présidentielle. On pourrait dire qu'il est l'Élon Musk de Mamadi Doumbouya, le Général qui sera peut-être amené à revêtir des tenues civiles en prélude à la prochaine élection présidentielle post-transition. Même si les Forces vives ne l'entendent pas de cette oreille et comptent instaurer une gouvernance civile à partir du 1er janvier 2025, date officielle de la fin de la transition, selon un accord dynamique conclu entre les autorités guinéennes et la CEDEAO.
Dans cette configuration politico-affairiste, d'ombre et de lumière, les autres opérateurs économiques doivent-ils jeter la première pierre à Kerfalla Person Camara parce qu’il sort pour la première fois des "ténèbres" — clandestinité — à ses risques et périls ? En effet, cela suppose que KPC ne pourra plus jouer sur plusieurs tableaux et devra assumer les conséquences de son choix en cas d'une éventuelle défaite de son candidat ou d'en jouir les retombées en cas de victoire. Sur ce plan, il fait preuve d'un extrême courage, contrairement à ses "adversaires" de l'ombre, qui pourraient toujours nier leur soutien. De là à penser que cette fois-ci KPC joue la fortune de toute une vie, il n'y a qu'un pas qu'il est facile de franchir. Difficile de savoir en ce moment quelles sont ses chances de réussite sur une échelle de zéro à dix ! Enfin, en dehors des espèces sonnantes et trébuchantes, quel poids électoral peut-il réellement apporter à une probable candidature de Mamadi Doumbouya ?
L’avenir dira si ce coup de poker portera ses fruits ou si, au contraire, il marquera un tournant périlleux dans la trajectoire de cet homme d’affaires influent. Pour l’instant, le jeu est lancé. Wait and see !
Par Abdoulaye Sankara |